Sébastien de Montragoux «Je suis d'un naturel généreux: l'erreur d'une femme ne me pousse pas à croire que toutes les femmes sont fautives.»

Petit questionnaire

✶ Vous savez qu'il s'est passé un phénomène étrange dernièrement. Cela a eu pour conséquence de faire venir des personnes d'un "autre monde" selon leurs dires. Quel est votre avis sur le sujet ?
Rien à foutre.

✶ Que pensez-vous d'Auradon ?
C'est grand, c'est propre, ça change des rues de l'île. Je pense pouvoir m'y accommoder assez rapidement.

✶ Pensez-vous que la magie devrait être à nouveau autorisée à Auradon ou restée interdite ?
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Coucou maman ! Comment ça s'est passé ta journée ? Tu ne t'es pas trop ennuyée avec belle-maman numéro 1 ? Je ne l'aimais pas trop. Elle parlait trop et toujours pour parler d'elle. Je pouvais même pas raconter mes journées d'école avec elle. Tu te souviens de ma première rentrée ? Moi pas trop. Je sais juste qu'elle est venue me rechercher mais qu'on est reparti super tard parce qu'elle parlait avec le professeur. Papa dit que je devrais pas dire ce genre de mot mais je sais que tu lui répétera pas. Elle était... chiante

Sébastien était un tout jeune enfant. Comme très souvent, il était venu raconter sa journée à sa mère. C'était son moment privilégié avec elle malgré ce que son père en pensait. Ses parents n'étaient plus mariés. Ils s'étaient séparés d'une façon tragique alors que Sébastien n'était encore qu'un enfant. A l'époque il n'avait pas trop compris ce qu'il se passait. Pendant plusieurs jours il n'avait pas revu sa mère puis, finalement, son père lui avait révélé l'endroit où elle se trouvait. Il n'approuvait pas que son fils aille lui rendre visite mais Sébastien affichait toujours un immense sourire lorsqu'il revenait qu'il n'avait pas eut le cœur à priver son unique enfant de cette joie.
Depuis, celui qu'on surnommait La Barbe Bleue s'était remarié deux fois. Il s'était séparé de sa seconde épouse lorsqu'elle avait essayé de prendre le pas sur son fils. C'était une femme trop orgueilleuse qui voulait passer avant tout et tout le monde, y compris son beau-fils. Il en avait été hors de question. Suite à leur violente discussion elle était partie et plus personne dans le quartier n'avait entendu parler d'elle.


[...]

Maman, maman !! Papa a laissé tomber sa nouvelle femme. Elle aussi était méchante. Tu crois que c'est quelque chose de normal pour une belle-mère ? Il parait que oui, un garçon de mon école me l'a dit. Ils envoient les belles-mères sur l'île, comme la directrice de l'école et ses deux filles. Son chat aussi est moche, en plus il est vieux et il pue. Mais bon. Tu sais pourquoi la méchante nous a quitté ? Elle criait tout le temps et se mettait en colère pour rien. C'est pas ma faute si sa robe était mieux en bleu qu'en blanc. J'ai voulu lui faire plaisir. C'est papa qui m'avait dit d'être gentil avec elle. Bah elle aime pas le bleu. Elle m'a attrapé le bras et m'a enfermé dans le placard dans ma chambre. Papa était pas content en rentrant. Ils se sont disputés très fort. J'ai cru que c'était ma faute mais papa a dit que non. De toute façon elle n'était plus aussi gentille qu'avant. De toute façon elle était moche et elle disait n'importe quoi.

Troisième mariage et encore un échec. Sébastien était heureux. Il savait qu'il serait le seul enfant de Bertrand de Montragoux pour un petit temps encore, ce qui signifiait que personne n'essayerait de lui voler sa place et l'affection que son père lui portait. Qui en aurait été capable de toute façon ? Sa mère était la plus jolie des épouses de son père et il y avait encore un tableau d'elle dans l'une des pièces de la maison. Elle avait des yeux en amande, des yeux d'un bleu royal presque inhumain, des traits fins, des lèvres fines et roses, de longs cheveux bruns foncés qui lui descendaient en légères boucles jusqu'à la moitié du dos. Le tableau qu'il restait d'elle ne lui rendait pas assez justice et pourtant, c'était un magnifique tableau. Sébastien avait hérités de certains traits de sa mère et il était persuadé que c'était pour ça que son père l'aimait autant. Mais il tenait aussi beaucoup de son père, un parfait mélange entre ses deux parents. De son père il avait hérité des yeux sombres et les cheveux du même bleu corbeau, une variante de noir intense qui laissait parfois apparaître quelques reflets bleus. C'était ce noir qui avait valu à son père son surnom de La Barbe Bleue. Il possédait la plus belle barbe de toute l'île et sûrement la plus belle barbe du monde. Ça lui donnait un air effrayant, dépourvu de chaleur. Dans les yeux du père, comme du fils on pouvait facilement se perdre. Ils étaient aussi profonds que les abysses et aussi effrayant que le néant. C'était ces yeux qui permettaient à Sébastien de s'imposer auprès des autres enfants. Ces yeux et son attitude pleine de certitude. Il frôlait l'arrogance et flirtait avec l'impertinence. Il avait quelque chose d'aussi noble qu'effrayant et cela ne venait pas que de son nom à particule. Sébastien avait ça dans les veines et il n'aurait pas été étonnant qu'une fois qu'il se coupe ce soit du sang bleu qui coule.


[...]

En grandissant, Sébastien était devenu un jeune garçon d'une immense beauté. Il tenait un peu plus de sa mère et n'effrayait pas encore autant que son père mais on évitait tout de même de s'attirer ses foudres. Il était plaisant à regarder et à écouter. Il maniait la langue comme personne et usait de son vocabulaire français pour faire chavirer quelques coeurs lorsque l'envie lui en prenait. Il donnait l'impression de prendre le monde de haut tout en restant miraculeusement abordable. C'était la son charme. Lorsqu'il vous adressait la parole, il était impossible de ne pas l'écouter. Lorsqu'il parlait en classe, tout le monde se taisait pour boire ses paroles comme des paroles saintes.

Bonjour maman. Tu as passé une bonne journée ? Pour moi tout s'est bien passé. Aujourd'hui on a eut un contrôle sur les grandes figures maléfiques de l'histoire. C'était assez drôle à voir. Je pense que la plupart étaient juste des enfants gâtés. On a par exemple parlé de Maléfique qui a piqué une crise parce qu'elle n'avait pas été invitée au baptême d'un stupide enfant. Qu'est-ce que les gens peuvent être simple d'esprit, se mettre dans ces états la juste pour ça. J'ai trouvé ça très con, encore plus con quand on sait de quel genre de magie elle était capable. Tout ce pouvoir gâché pour une simple question d'orgueil. Elle aurait put faire de grandes choses mais non, allons plutôt voler une sucette à un enfant. Et ne parlons pas des autres. Entre la folle aux chiens qui a jugé qu'il serait plus amusant de voler des chiots que d'aller en acheter dans un élevage. Je ne sais pas si c'est de l'avarice parce qu'elle ne voulait pas dépenser un sou ou juste de la connerie. Sûrement un peu des deux. Ce que les méchants peuvent être cons dans les histoires. Un bon plan ça se travaille, ça s'élabore et ça se calcule. La belle-mère de Blance-Neige par exemple avait un bon plan. Elle a eut la bêtise de confier une tâche délicate à quelqu'un d'autre mais à essayé de rattraper elle même cette erreur. Elle a prit les choses en main, ça c'est honorable. Elle a utilisé ce qu'elle avait à disposition et avait plus ou moins réussi son coup si les nains n'avaient pas eut l'envie saugrenue de mettre Blanche-Neige dans un cercueil en verre. Ils devaient être sacrément tordus et n'avoir pas grand chose d'autre à foutre mais bon, chacun ses délires. Mais tout ça pour quoi au juste ? Elle était reine, elle aurait put donner un fils au roi et éclipser définitivement Blanche-Neige mais non, il fallait l'éliminer parce qu'un miroir lui a dit qu'elle était plus belle qu'elle. C'est con ce que le manque de confiance en soi peut faire faire aux femmes.

Il sourit à sa mère. Finalement, heureusement que ce miroir détraqué n'avait pas été cherché plus loin que le royaume de Blanche-Neige. Sébastien n'aurait peut-être jamais vu le jour sans ça.


[...]

Maman, il va falloir que je te laisse. J'espère que ça va aller sans moi. Tu sais, avec toutes les autres femmes que papa a eut après toi. Elles sont devenus laides de toute façon, alors que toi tu es incorrompue. Tu n'as peut-être pas entendu ce projet. A Auradon ils acceptent des élèves de l'île, une sorte de projet de réinsertion à la con. Mais bon, papa dit que ça peut me permettre de voir d'autres paysages et de m'amuser un peu plus qu'ici. Il n'a pas totalement tort, une prison c'est assez restreint et vu la pourriture de cette île, l'air frais me fera le plus grand bien. Quand j'aurais trouvé un manoir digne de ce nom je vais tout mettre en œuvre pour te récupérer, si papa veut bien. Je crois qu'il t'aime toujours autant et que c'est pour ça qu'il te conserve dans ce cabinet. J'aurais préféré qu'il jette les autres aux ordures mais il ne veut pas. Il dit que c'est pour ne pas oublier. Bref ! Je pars bientôt. Tu vas me manquer mais je t'écrirais souvent.

Sébastien enlaça sa mère une dernière fois avant de partir pour Auradon. Il était le seul, avec son père, à savoir qu'elle était toujours la, bien conservée dans ce cabinet. Elle avait été recouverte d'une fine couche de cire depuis plusieurs années et contrairement aux autres épouses de Barbe Bleue, elle avait conservé sa beauté. Son corps ne s'était pas décomposé, comme si une intervention divine l'en avait empêché, ce phénomène avait été observé chez certains saints et si sa mère n'en était pas tout ç fait une, elle y ressemblait plus que quiconque.